Nous rencontrons régulièrement des usagers qui sont orientées vers nous par différentes structures du champ social et qui au final préfèrent se faire aider directement par ces structures plutôt que d’apprendre à utiliser eux-mêmes leur équipement numérique. Ils sont souvent dans des situations très précaires ou/et fragiles et ont d’autres urgences que l’apprentissage des outils numériques. Ils peuvent aussi faire face à un découragement face à ce qui leur apparaît comme des outils complexes ou hors de leurs capacités.

Le travail que nous menons dans le champ de l’inclusion numérique depuis 5 ans, nous amène à une nouvelle étape issue de nos réflexions sur cet enjeu majeur pour le succès de nos actions mais également de l’inclusion numérique de manière plus générale : la fidélisation des publics.

Le développement de nos ateliers de médiation numérique, notre implication, via le projet structurant Coll.in, dans l’accompagnement et l’articulation des acteurs de la médiation numérique avec des structures sociales pouvant orienter des publics, nous ont permis de constater qu’un des facteurs primordial pour le succès d’une action de médiation numérique est de motiver, capter les publics et de les fidéliser sur un cycle complet d’ateliers.

Pour cela, nous avons pu inventer et expérimenter plusieurs stratégies, comme par exemple travailler en collaboration directe avec des structures de solidarité et/ou du travail social. Animer des ateliers à destination de leurs publics afin que ces derniers soient en confiance, grâce à la présence de leurs référents déjà identifiés.

Il nous est alors plus aisé de mettre en place un suivi et une pédagogie personnalisés et adaptés à leurs fragilités.

Cette collaboration avec des structures d’accueil et du travail social permet de pouvoir former les publics sur une durée plus adaptée à l’acquisition des savoirs-faire et réaliser par là-même notre travail d’inclusion numérique.

Malgré tout, fort est de constater que cela ne suffit pas toujours à fidéliser les apprenants jusqu’à l’assimilation des savoirs-faire et surtout l’acquisition d’une certaine forme de confiance en eux face à ces outils, confiance qui leur est indispensable tant pour la réalisation en autonomie de leurs démarches administratives que pour un accès à l’emploi souvent compromis par leur difficultés « numériques ».

Pourtant, cette situation pourrait être améliorée en rendant, d’une part, les personnes autonomes sur des pratiques redondantes (comme les déclarations mensuelles, les recherches d’attestations, ..), et d’autres part si elles avaient des notions dites de base (bonne gestion de la boite mail, conservation des mots de passe,…) facilitant soit leur accompagnement à une démarche administrative en ligne par un travailleuse.r social.e , soit leur retour à l’emploi.

Il faut donc orienter différemment nos apprentissages en formant ces personnes fragiles aux outils numériques par un tout autre biais : celui de la création.

C’est grâce à notre deuxième axe de travail qui est la création numérique, que nous avons remarqué, de façon récurrente, que les personnes très éloignées des outils numériques et qui pouvaient se trouver en forte difficulté d’apprentissage sur des utilisations de base, telles les démarches administratives en ligne, avaient une capacité d’assimilation des connaissances et d’acquisition d’une certaine confiance en eux lorsqu’il s’agissait d’une utilisation créative des outils.

Face à ce constat, nous souhaitons développer une nouvelle approche de l’inclusion numérique : La Créaclusion.

Il nous faut, en effet, repenser nos stratégies pédagogies et concevoir des médiations nouvelles plus attractives en y apportant une dimension créative et artistique tout en continuant à prendre en compte les fragilités et/ou urgences sociales, alimentaires, sanitaires, économiques et psychologiques de nos publics.